Cancers cutanés

 
 
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RAPPELS FONDAMENTAUX

 

La peau est constituée de deux assises, l'épiderme et le derme, qui recouvrent une couche sous-cutanée, l'hypoderme. L'épiderme, séparé du derme par une membrane basale, possède trois couches : une couche profonde, germinative (stratum basal et stratum spinosum), une couche moyenne (stratum granulosum) et une couche superficielle, cornée (stratum corneum). L'épiderme renferme essentiellement des kératinocytes qui, naissant dans le stratum basal, migrent vers la surface pour participer à la constitution de la couche cornée. Les mélanocytes sont moins nombreux et se localisent dans le stratum basal. Le derme présente deux couches : le derme papillaire, sous-épidermique, et le derme réticulaire, qui recouvre l'hypoderme.

 

 

DÉFINITION

 

Les tumeurs malignes primitives de la peau sont très nombreuses. Nous limiterons ce chapitre à trois types de tumeurs : les carcinomes basocellulaires et spinocellulaires, tous deux de nature épithéliale, et le mélanome, qui dérive quant à lui de la prolifération de cellules issues du système mélanocytaire.

 

 

CARCINOME BASOCELLULAIRE

 

Épidémiologie - Le carcinome basocellulaire (CBC) survient habituellement au-delà de 50 ans (âge moyen lors du diagnostic : 65 ans) et atteint autant l'homme que la femme. Aux États-Unis, les CBC représentent près de 80% des cancers cutanés autres que le mélanome.
Facteurs de risque - Ce sont l'exposition solaire et le type cutané (sujets blonds et peu pigmentés).
Aspects cliniques - Il existe plusieurs aspects de CBC, les principaux étant :

  • le carcinome plan superficiel : petite papule, rencontrée principalement sur la joue ou la région temporale;
  • l'ulcus rodens : petite ulcération, rencontrée surtout sur la joue, l'aile du nez ou le cuir chevelu;
  • le carcinome pagétoïde (qui présente des caractères analogues à ceux de la maladie de Paget) : souvent multiple et le plus fréquemment observé sur le tronc.

Évolution - Les CBC ont un pronostic généralement favorable : ils évoluent lentement et ne présentent quasiment jamais de métastases (ce risque est évalué à moins de 0.01%). Certaines localisations peuvent toutefois être d'évolution bien plus péjorative (partie centrale du visage, oreille ou cuir chevelu) en constituant des carcinomes térébrants (qui a tendance à creuser, à gagner en profondeur) qui peuvent emporter le patient de complications infectieuses ou hémorragiques.
Principes du traitement - Ils reposent principalement sur l'électrocoagulation (pour les petites lésions, à faible risque évolutif), l'ablation chirurgicale (lésions agressives, topographie à haut risque), la radiothérapie (essentiellement chez la personne âgée) ou la cryochirurgie (par azote liquide).

CARCINOME SPINOCELLULAIRE

 

Épidémiologie - Le carcinome spinocellulaire (CSC) est plus rare que le précédent. Il survient habituellement lorsque la personne est très âgée et atteint plus souvent l'homme que la femme.
Facteurs de risque - Ce sont l'exposition solaire, les rayons X, certaines cicatrices, le contact prolongé avec l'arsenic, le goudron ou les huiles minérales, les traitements immunosuppresseurs au long terme et le tabagisme (CSC des lèvres ou de la cavité orale).
Aspects cliniques - Le plus souvent, le CSC se présente sous la forme d'un nodule ulcéré ou d'une érosion superficielle, préférentiellement sur la lèvre inférieure ou la région centrofaciale.
Évolution - Les CSC sont des tumeurs très infiltrantes, destructrices et génératrices de
métastases lymphatiques et sanguines
(ces métastases sont plus fréquentes pour certaines localisations du CSC : muqueuses, oreille, lèvre, organes génitaux externes, cicatrices de brûlures ou ulcérations chroniques).
Principes du traitement - Le traitement doit être précoce et chirurgical (exérèse de la tumeur avec curage ganglionnaire) chaque fois que c'est possible. Dans le cas contraire (existence de métastases, patient très âgé ou en mauvais état général), le traitement repose sur la radiothérapie ou la chimiothérapie (cisplatine).

 

MÉLANOME

 

Épidémiologie - L'incidence du mélanome a augmenté de 300% pendant les 40 dernières années : à ce rythme et dans une dizaine d'années, le risque de développer un mélanome pendant sa vie sera de 1%. Atteignant autant l'homme que la femme, il sera responsable de 400 décès cette année au Canada et 7300 aux États-Unis.
Facteurs de risque - Ils incluent l'exposition solaire (UVB sans aucun doute, UVA encore discuté), la race (le risque est de 10 à 20 fois moindre chez les Noirs et les Asiatiques que chez les Blancs), des caractéristiques morphologiques (personnes au teint clair, aux cheveux blonds ou roux, aux yeux bleus et avec éphélides), les antécédents familiaux de mélanome (retrouvés dans 10% des cas), la présence de nombreux naevus (risque multiplié par 64 pour plus de 50 naevus de plus de 2 mm de diamètre), l'immunosuppression et le xeroderma pigmentosum. L'importance de ces facteurs de risque est hiérarchisée comme suit :

Risque

Facteurs de risque

Haut
(accru de plus de 50 fois)

naevus se modifiant en permanence,
naevus cliniquement atypiques chez un malade dont 2 membres de la famille ont eu un mélanome,
âge adulte (par opposition à l'enfance),
plus de 50 naevus de plus de 2 mm de diamètre

Intermédiaire
(accru d'environ 10 fois)

antécédents familiaux de mélanome,
race blanche (comparativement à race noire ou asiatique),
antécédents personnels de mélanome

Faible
(accru de 2 à 4 fois)

immunosuppression,
sensibilité au soleil ou exposition solaire excessive

Aspects cliniques - Le mélanome débute habituellement par une hyperpigmentation localisée, soit sur peau saine (50 à 80% des cas), soit sur un naevus préexistant (20 à 50% des cas).

 

Les quatre principaux types sont le mélanome extensif superficiel (MES), le mélanome sur lentigo malin, le mélanome lentigineux acral et le mélanome nodulaire. De ces quatre types, seul le dernier n'a pas de phase d'extension superficielle (invasion en profondeur d'emblée) :

  • MES (67% des cas) : diagnostiqué vers 40-50 ans, il se localise volontiers au niveau du dos chez l'homme et de la jambe chez la femme;
  • mélanome sur lentigo malin (9% des cas) : diagnostiqué à un âge plus avancé (70 ans), on l'observe souvent sur les joues ou les tempes;
  • mélanome lentigineux acral (4% des cas) : diagnostiqué vers 60 ans, il siège préférentiellement aux paumes, aux plantes, autour des ongles ou au niveau des muqueuses (ce dernier est de très mauvais pronostic en raison du diagnostic tardif);
  • mélanome nodulaire (10% des cas) : diagnostiqué vers 40-50 ans, il peut se localiser sur n'importe quelle partie du corps.

 

Évolution - Le mélanome est une tumeur très agressive qui impose un bilan d'extension complet, tant de son extension locale que de ses éventuelles métastases (foie, poumon, os, cerveau). Le pronostic du mélanome se base sur deux indices : celui de Clark (tableau 1), qui définit l'envahissement en profondeur, et celui de Breslow (tableau 2), qui repose sur l'épaisseur de la tumeur.

 

Stade

Définition

TS5

1

intra-épidermique

100%

2

dermique
papillaire
discontinu

99%

3

dermique
papillaire continu

95%

4

dermique
réticulaire

75%

5

hypodermique

39%


Tableau 1 : Indice de Clark (TS5)

 

Épaisseur

TS5

< 0.75

100%

0.76-1.50

94%

1.51-3.99

83%

> 4.0

40%


Tableau 2 : Indice de Breslow (TS5; épaisseur en mm)

Principes du traitement - Ils reposent sur l'exérèse chirurgicale pour les stades précoces (grande marge d'excision, évidement ganglionnaire). Les stades plus avancés relèvent de la chimiothérapie (polychimiothérapie comportant de la dacarbazine).

 

PHOTOPROTECTION

 

L'implication de l'exposition solaire inconsidérée dans l'apparition de tumeurs cutanées malignes est si bien documentée que la prévention de ce type de cancer passe essentiellement par la protection vis-à-vis du soleil. Il est donc important de préciser quelques points concernant la photoprotection :

  • l'utilisation de crèmes solaires pendant les 18 premières années de la vie réduit de 80% le risque de voir se développer un cancer cutané autre que le mélanome;
  • les vitres (fenêtre, pare-brise) arrêtent les UVA, mais pas les UVB;
  • l'application de crèmes solaires doit se faire de 30 à 60 minutes avant l'exposition;
  • les enfants de moins de 6 mois doivent être protégés du soleil par leurs vêtements et l'ombre, plutôt que par des crèmes;
  • éviter l'exposition solaire entre 11 et 15 heures;
  • les crèmes solaires water-resistant ne sont plus efficaces après 40 minutes de baignade, alors que celles dites waterproof le restent pendant au moins 80 minutes;
  • une crème à facteur de protection de 15 filtre 93% des UVB (97% pour un facteur de 30);
  • un facteur de protection de 15 signifie que pour une personne donnée, les coups de soleil apparaîtront pour une exposition 15 fois plus longue qu'en l'absence de crème;
  • globalement, une crème solaire voit son efficacité diminuer après 1 heure d'exposition, et au bout de 3 heures, les risques de coups de soleil deviennent identiques à ceux d'une peau non protégée.

 

EN RÉSUMÉ

 

Le carcinome basocellulaire est essentiellement lié à l'exposition solaire prolongée. Au niveau du visage, il peut être plan ou ulcéré. Globalement, il est de bon pronostic puisqu'il ne s'accompagne ni de métastase ni d'essaimage ganglionnaire. Son traitement est surtout chirurgical. Le carcinome spinocellulaire est lié entre autres à l'exposition solaire et au tabagisme. Il se localise le plus souvent sur la lèvre inférieure ou la région centrofaciale. Son pronostic est réservé, car la tumeur est infiltrante et donne volontiers naissance à des métastases. Son traitement est surtout chirurgical. Le mélanome est une tumeur hautement maligne dont l'incidence croît de manière dramatique. Ses principaux facteurs de risque sont l'exposition solaire, le type morphologique (teint clair, yeux bleus, cheveux blonds ou roux, éphélides), les antécédents familiaux de mélanome (10%), ainsi que le nombre et le diamètre des naevus. Prenant naissance sur peau saine ou sur un naevus préexistant, le mélanome a le plus souvent une phase initiale d'extension superficielle (sauf mélanome nodulaire). Le pronostic de cette tumeur est lié à l'existence de métastases (foie, poumon, os, cerveau), ainsi qu'aux indices de Clark (envahissement cutané en profondeur) et de Breslow (épaisseur de la tumeur). Son traitement idéal est chirurgical, le taux de survie à 5 ans variant de 40 à près de 100% selon les indices précédents. La photoprotection est le meilleur traitement préventif des cancers cutanés. Il faut se rappeler du fait qu'une crème solaire n'est efficace qu'environ une heure et qu'elle doit être appliquée au moins 30 minutes avant exposition. Il est aussi conseillé de ne pas s'exposer entre 11 et 15 heures et d'utiliser une crème avec facteur de protection minimal de 15.

© 2008