MICI

 
 
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RAPPELS FONDAMENTAUX

Le tube digestif commence à la cavité orale et se termine au niveau de l’anus. Il comporte successivement la cavité orale, l’oropharynx, l’oesophage, l’estomac, l’intestin grêle (duodénum, jéjunum et iléon), le gros intestin (côlon ascendant avec son caecum, côlon transverse, côlon descendant, côlon sigmoïde et rectum), puis l’anus. Les parois du tube digestif sont au nombre de cinq : la muqueuse (profonde), la musculaire muqueuse, la sous-muqueuse, la musculeuse et l’adventice (superficielle).

ÉPIDÉMIOLOGIE DE LA MALADIE DE CROHN

Incidence - L’incidence moyenne de la MC est de 7/100 000. Par ailleurs, l’incidence de la MC croît plus rapidement que celle de la RCH.

Prévalence
- La chronicité et la longue évolution des MICI expliquent que leur prévalence soit bien supérieure à leur incidence. La prévalence de la MC varie de 20 à 198.5/100 000.

Âge au moment du diagnostic - La MC présente deux pics d’incidence : le premier entre 15 et 30 ans, le second (moins marqué) entre 60 et 80 ans.

Sex-ratio
- Il existe probablement une très discrète prédominance féminine dans la MC, mais le sex-ratio peut être considéré comme étant proche de 1 en première approximation.

Facteurs ethniques - Ils sont indiscutables : les populations d’Europe du Nord (Scandinaves) sont plus exposées, ainsi que les Juifs ashkénazes.

Facteurs socio-économiques - Les classes socio-économiques élevées sont plus exposées à la MC.

ÉTIOLOGIE DE LA MALADIE DE CROHN

L’étiologie de la MC est inconnue, mais plusieurs facteurs semblent devoir jouer un rôle.

Facteurs familiaux ou génétiques - Plusieurs arguments plaident en faveur de leur intervention : forte
incidence de la MC chez les jumeaux monozygotes
(46%), existence d’antécédents familiaux dans 10% des cas en moyenne (6 à 33% de formes familiales), prépondérances ethniques (Blancs et Juifs).

Facteurs environnementaux - Ils sont essentiellement infectieux et toxiques (tabagisme) :

  • facteurs infectieux : plusieurs micro-organismes ont été suspectés dans la genèse de la MC (Mycobacterium paratuberculosis, Bacteroides vulgatus, Pseudomonas, paramyxovirus), mais aucune preuve formelle n’a pu être établie à ce jour. Certaines études démontrent toutefois un risque accru en cas d’infections postnatales (rougeole, varicelle, oreillons);
  • le tabagisme multiplie le risque de développer une MC par 2. Ce risque serait d’ailleurs davantage marqué chez la femme;
  • facteurs médicamenteux : les oestroprogestatifs ne semblent pas intervenir, mais les anti-inflammatoires non stéroïdiens peuvent aggraver une MC déjà déclarée;
  • facteurs alimentaires : aucun n'a pu être suspecté.

Facteurs immunologiques - La nature auto-immune de la MC reste encore à démontrer.

 

 

ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA MALADIE DE CROHN

Localisation des lésions - Elles siègent préférentiellement sur l’iléon terminal, le côlon et l’anus, mais peuvent atteindre l’ensemble du tube digestif (de la cavité orale à l’anus). Le rectum est atteint dans environ la moitié des cas.

Distribution des lésions - Elles sont classiquement discontinues, c’est-à-dire séparées par des intervalles de muqueuse saine, et transmurales (avec donc atteinte de la couche musculaire de la paroi intestinale).

Types de lésions - Elles sont sténosantes et/ou ulcérées.

 

SIGNES CLINIQUES DE LA MALADIE DE CROHN

La MC est une affection chronique évoluant par poussées entrecoupées de rémissions dont la durée est imprévisible.

Manifestations générales - On peut observer une fatigue, une perte de poids et des épisodes fébriles contemporains des poussées évolutives.

Manifestations digestives - Elles sont dominées par les douleurs abdominales et la diarrhée, soit hydrique et éventuellement sanglante dans les formes coliques, soit graisseuse par malabsorption dans les formes grêliques étendues.

Manifestations anopérinéales - Elles s’observeraient un jour ou l’autre dans près de 90% des cas. Il peut s’agir d’ulcérations, de fissures, d’abcès ou de
sténose
anorectale.

Manifestations extra-intestinales - Elles sont potentiellement très nombreuses et révèlent même la MC dans 10% des cas :

  • manifestations ostéoarticulaires : arthrites, spondyl arthrite ankylosante, sacro-iliite;
  • manifestations cutanéomuqueuses : érythème noueux, pyoderma gangrenosum, aphtose buccale;
  • manifestations ophtalmologiques : épisclérite, uvéite antérieure aiguë;
  • manifestations hépatobiliaires : stéatose hépatique, cholangite sclérosante;
  • manifestations urinaires : infections urinaires, urétéro-hydronéphrose, lithiase oxalique;
  • manifestations cardiovasculaires : endocardite infectieuse, complications thromboemboliques, péricardite;
  • manifestations respiratoires : bronchectasies;
  • manifestations hématologiques : hypercoagulabilité.

 

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES DE LA MALADIE DE CROHN

Examens biologiques de base - Ils révèlent habituellement une anémie (50 à 65% des cas), une hyperleucocytose (20% des cas) et parfois une thrombocytose.

Examens d’imagerie - Ils incluent la radiographie abdominale sans préparation, la tomodensitométrie, l’échographie, le transit du grêle et les examens endoscopiques (coloscopie, iléoscopie).

ASCA et pANCA - Les ASCA (anticorps antisaccharomyces cerevisiae) et pANCA (anticorps anticytoplasmes des polynucléaires neutrophiles) semblent pouvoir aider au diagnostic positif de la MC et à son diagnostic différentiel vis-à-vis de la RCH. Toutefois, 10% des patients atteints de maladie coeliaque ont des ASCA positifs.

ASCA

pANCA

Maladie

Définitions

+

-

MC

spécificité 97%
sensibilité 57%

-

+

RCH

spécificité 97%
sensibilité 49%

 

 

COMPLICATIONS DE LA MALADIE DE CROHN

Cancérisation - Le risque évolutif majeur de la MC est l’apparition d’un cancer intestinal : soit adénocarcinome colorectal (risque moyen multiplié par 2.5, mais plus élevé chez le sujet jeune avec atteintes essentiellement coliques), soit cancer de l’intestin grêle. Un risque accru de carcinome spinocellulaire a par ailleurs été rapporté.

Autres complications - Elles sont potentiellement nombreuses : fistules (entéro-entériques, entérocutanées, entérovésicales ou même entérovaginales), abcès (surtout au niveau de la fosse iliaque droite), occlusions (dans les formes iléales de MC), perforations (surtout de l’intestin grêle), hémorragies digestives (surtout dans les formes rectosigmoïdiennes) et
colectasies (surtout le côlon transverse).

 

 

PRINCIPES DU TRAITEMENT DE LA MALADIE DE CROHN

L’objectif du traitement est d’assurer des rémissions aussi durables que possible.

Traitement médical - Il repose sur l’acide 5-amino-salicylique pour les poussées modérées (38 à 69% de rémission) et sur les corticoïdes en cas de poussées plus sévères (rémission de 66 à 78%). Les poussées graves doivent faire hospitaliser le patient.

D’autres médicaments sont utilisables selon les cas :

  • le métronidazole : le risque de neuropathie périphérique est cependant élevé (50% après 6 mois d’utilisation);
  • le budésonide : son principal avantage est de réduire le risque de corticodépendance;
  • les immunosuppresseurs (azathioprine, 6-mercaptopurine, méthotrexate) : ils imposent une surveillance régulière de la formule sanguine et des enzymes hépatiques;
  • l’infliximab : il s’agit d’un anticorps monoclonal dirigé contre le facteur de nécrose tumorale alpha, seul médicament efficace dans les maladies de Crohn avec fistules.

Traitement chirurgical - La chirurgie, aussi limitée que possible, sera un jour ou l’autre l’option thérapeutique d’environ 70% des patients et la moitié d’entre eux devra avoir recours à au moins une réintervention ultérieure. Le risque de récidive des lésions est important, principalement à proximité du site d’anastomose.

Autres - Un régime sans résidu (fibres) est institué au cours des poussées et des traitements symptomatiques de l’anémie ou de la diarrhée peuvent être justifiés.

 

 

TABLEAU COMPARATIF DE LA MALADIE DE CROHN ET DE LA RECTOCOLITE HÉMORRAGIQUE

Caractéristiques

Maladie de Crohn

Rectocolite hémorragique

 

 

 

Épidémiologie

 

 

Incidence

7/100 000

11/100 000

Prévalence

20 à 198.5/100 000

35 à 169.7/100 000

Pics d’incidence

15-30 ans; 60-80 ans

15-35 ans; 55-65 ans

Sex-ratio

environ 1

environ 1

Facteurs ethniques

oui

oui

Facteurs socio-économiques

niveau élevé

pas de certitude

 

 

 

Anatomie pathologique

 

 

Localisation en amont du grêle

possible

non

Localisation sur le grêle

oui

non

Sténoses

oui

oui

Localisation sur le côlon

oui

oui

Localisation anale

oui

non

Ulcérations

oui

oui

Atteinte de la musculeuse

oui

non

 

 

 

Signes cliniques

 

 

Poussées et rémissions

oui

oui

Douleurs abdominales

oui

rares

Diarrhée

oui

oui

Sang dans les selles

rare

oui

Manifestations extra-intestinales

oui

non

 

 

 

Complications

 

 

Risque de cancérisation

oui

oui

Risque de fistules

oui

non

 

 

 

Rôle du tabac

 

 

Rôle du tabac

multiplie le risque de MC par 2 en moyenne

a un certain effet protecteur

 

 

EN RÉSUMÉ

Les maladies inflammatoires cryptogénétiques intestinales (MICI) regroupent la maladie de Crohn (MC) et la rectocolite hémorragique (RCH). La MC a une incidence moyenne de 7/100 000 (RCH : 11/100 000) et débute le plus souvent entre 15 et 30 ans, sans nette prédominance d’un sexe. Son étiologie est inconnue, mais plusieurs facteurs semblent incriminés (génétiques, infectieux, tabagisme; RCH : le tabac a un effet protecteur). Les lésions de la MC siègent préférentiellement sur le côlon, l’iléon terminal et la région anopérinéale, mais la totalité du tube digestif peut être atteinte (RCH : côlon). Les lésions sont transmurales et discontinues (RCH : continues et n’atteignent pas la musculeuse). Les principaux signes digestifs consistent en des douleurs abdominales avec de la diarrhée, mais de nombreuses manifestations extra-intestinales sont possibles (arthrites, érythème noueux, pyoderma gangrenosum, aphtose buccale, uvéite antérieure). Les examens biologiques de base objectivent une anémie avec hyperleucocytose et la recherche des ASCA et des pANCA pourrait s’avérer d’un grand intérêt diagnostique (ASCA-/pANCA+ : forte probabilité de RCH; ASCA+/pANCA- : forte probabilité de MC). Les examens d’imagerie incluent obligatoirement la coloscopie et l’iléoscopie. Les deux complications majeures de la MC sont la cancérisation (risque moyen multiplié par 2.5), soit sur le côlon, soit sur l’intestin grêle, ainsi que les fistules. Le traitement repose principalement sur l’acide 5-amino-salicylique et les corticoïdes, mais le budésonide (moins de corticodépendance) et l’infliximab (en cas de MC avec fistules) présentent un intérêt certain. La chirurgie sera toutefois nécessaire chez 70% des patients atteints de MC et les récidives postchirurgicales sont fréquentes.

© 2008